Le Canada est confronté à une pénurie sérieuse de ressources humaines en santé (RHS) dans la profession de laboratoire médical, touchant surtout les technologistes de laboratoire médical (TLM).
En 2010, l’Institut canadien d’information sur la santé a identifié que presque la moitié de tous les TLM seront admissibles à prendre leur retraite d'ici 10 ans, avec l’effet le plus évident dans les régions rurales et éloignées du Canada. Cette période touche à sa fin maintenant pour la communauté professionnelle dans l’ensemble des provinces et des territoires, exerçant un impact remarquable sur les organisations et les employés.
Des données récemment publiées révèlent que la diminution la plus considérable de la main-d’œuvre des TLM (de 2010 à 2014) a été associée aux personnes qui ont obtenu leurs diplômes il y a de 21 à 30 ans. Malheureusement, on n’a pas enregistré une augmentation correspondante du nombre de TLM obtenant leur certification dans n’importe quelle catégorie d’âge. Des résultats notables de l’Institut canadien d’information sur la santé comprennent :
- En 2015, 40 % des TLM avaient 50 ans ou plus. L’Ontario, la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse ont affiché l’âge moyen le plus élevé des TLM; 1
- Les TLM avaient l’âge moyen collectif le moins élevé en 2015 (44,3 ans) depuis 2008, représentant le changement aux données démographiques de la profession (consultez la graphique ci-dessous).
En plus des pénuries de personnel, les volumes et la complexité des flux de travail continuent d’afficher une tendance vers le haut dans la profession.2 Par exemple, l’Ontario a prévu une augmentation annuelle de 1,8 % des analyses de laboratoire entre 2005 et 2010; cependant, une croissance véritable d’environ 4 % par année a été enregistrée, entraînant une hausse du nombre d’analyses à un rythme plus rapide que la capacité de la main-d’œuvre.3
Garder le rythme des derniers progrès et des changements aux analyses, à la médecine de précision, à des appareils d'analyse de biologie délocalisée (ADBD) et à la technologie diagnostique n’est pas un accomplissement négligeable. Cela signifie que les étudiants, les professionnels et les programmes académiques doivent constamment acquérir une vaste quantité de nouvelles connaissances pour affronter effectivement les équipements et les situations de plus en plus complexes; pourtant, des restrictions budgétaires, des volumes de travail écrasants et des pénuries de personnel sont responsables d’un manque d’occasions de stages cliniques pour les étudiants.
Ce scénario représente un goulot d’étranglement dans la voie de l’étudiant vers la main-d’œuvre, qui entrave des solutions à la pénurie de RHS. Des programmes académiques sont requis pour obtenir un site de stage clinique et une place pour chaque étudiant avant d’entrer dans le programme. Les problèmes associés à de tels contrats limitent le nombre d’étudiants pouvant entrer dans la main-d’œuvre à un moment donné et, en fin de compte, peuvent contribuer à la pénurie de RHS croissante. Afin de changer cette situation, de nouveaux modèles de formation et de stages cliniques sont nécessaires. La Société canadienne de science de laboratoire médical (SCSLM) reconnaît l’importance des environnements d’apprentissage novateurs et de l’expérience pratique par l’entremise des stages cliniques afin d’assurer l’expertise de la prochaine génération de la profession de laboratoire médical. Des parties prenantes du laboratoire médical s’efforcent d’augmenter les programmes d’études basés sur la simulation pour soutenir des modèles de formation fondés sur des données probantes visant à diminuer les heures cliniques et augmenter le flux des étudiants dans la main-d’œuvre.
1 Ces données ne reflètent pas la méthodologie de l’ICIS utilisée pour calculer l’admissibilité à la retraite dans le passé. De plus, les calculs actuels excluent les données de la Colombie-Britannique (grand nombre de TLM), de l’Île-du-Prince-Édouard et des Territoires du Nord-Ouest (probablement supérieures à l’âge moyen national des TLM dans des régions rurales et éloignées). Dans le cadre de l’admissibilité à la retraite, la référence aux renseignements de l’ICIS est la plus pertinente; cependant, les données de 2015 indiquent que l’admissibilité à la retraite demeure en vigueur en l’absence de calculs actualisés de l’ICIS.
2Stratégies en évaluation (2001). Analyse de la conjoncture des questions liées aux ressources humaines qui touchent les technologues de laboratoire médical et les technologues en radiation médicale. Dernière consultation le 11 avril 2016 du site http://publications.gc.ca/collections/Collection/H39-635-2002F.pdf Gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador (2011). Medical Laboratory Technologists Workforce Model Report Newfoundland and Labrador. Dernière consultation le 11 avril 2016 du site www.health.gov.nl.ca/health/publications/MLT%20Workforce%20Model%20Report%20FINAL.pdf
3Sweetman A (2015). Session plénière LABCON (Société canadienne de science de laboratoire médical, SCSLM, Montréal), « Exploring the predicted increase in lab testing and the impending shortage of lab professionals. »
La SCSLM s’est lancée dans une initiative à long terme pour aider des programmes de formation, des organisations des soins de santé et la main-d’œuvre future de la profession de laboratoire médical à comprendre les lacunes actuelles du système. Ensemble, nous visons à augmenter le nombre d’étudiants TLM et l’entrée en pratique, ainsi qu’à collaborer pour produire des résultats fondés sur des données probantes afin de diminuer l’écart identifié.
Dans le cadre d’un projet à trois niveaux, on a cherché des renseignements par l’entremise des sondages formels, d’une analyse environnementale, des discussions en forums nationaux, des sessions ciblées de collecte de renseignements et du réseau Simulation Research Network.
Parmi les participants, on compte trois groupes d’intervenants principaux (universitaires, employeurs et étudiants), mais ce bassin s’élargit pour inclure d’autres décideurs, comme des organismes de réglementation, des spécialistes et des représentants des politiques. Le tableau ci-dessous contient les phases du projet et les rapports associés :
Pour la profession de laboratoire médical, tel qu’il a été établi par les participants au Forum national sur la simulation et les stages cliniques (2016), la simulation est définie comme suit :
« La simulation est une technique pédagogique visant à imiter des scénarios réels (en partie ou en totalité), qui permet aux participants de démontrer leurs connaissances, leurs aptitudes, leurs capacités et/ou leur jugement, et de recevoir la rétroaction. Cela peut comprendre, de façon non exclusive, la communication, la résolution de problèmes, l’esprit critique et la capacité à collaborer et à travailler de façon efficace avec une équipe des soins de santé. La simulation peut refléter des situations ou procédés simples ou complexes et peut être réalisée dans les exemples suivants :
- scénarios interactifs par cas écrits;
- jeux de système informatisé de bibliothèque;
- jeux de rôle interprofessionnels ou intraprofessionnels;
- patients normalisés;
- système d’entraînement comme des bras en caoutchouc pour la phlébotomie;
- simulation virtuelle pour l’identification d’échantillons;
- simulation haptique;
- simulation de haute-fidélité;
- hybrides des exemples susmentionnés.
Tout comme la simulation des soins de santé, la simulation en milieu universitaire englobe une gamme d’activités ayant en commun l’objectif élargi d’améliorer l’efficacité et l’efficience des services et en fin de compte, d’augmenter l’acquisition des compétences par les étudiants dans un environnement sain et sécuritaire qui diminue le risque potentiel aux patients, aux étudiants, au laboratoire et aux systèmes de santé en général. » 4
4 Définition créée par des parties prenantes pendant la Phase 1b du projet de la SCSLM : SCSLM (2016). Forum national sur la simulation et les stages cliniques. Dernière consultation le 1er mars 2017 du site https://www.csmls.org/csmls/media/documents/resources/SimulationandClinicalPlacementNationalForum_FR.pdf
La SCSLM lance une initiative nationale pour recueillir des renseignements fondés sur des données probantes, encourager des discussions averties et trouver des solutions pratiques; cette stratégie diminuera en fin de compte l’impact des pénuries de ressources humaines en santé (RHS) et des fardeaux de travail liés à la profession.
L’initiative sur la simulation et les stages cliniques a généré une quantité considérable de données et d’appui pour une meilleure inclusion de la simulation dans nos programmes académiques, et pour encourager de nouveaux modèles de stages cliniques en vue d’accroître le nombre de places pour les étudiants.
Les conclusions de haut niveau jusqu’à cette date sont :
Analyse environnementale des programmes de formation (2016):
L’utilisation d’un stage clinique peut suffire pour satisfaire aux exigences d’agrément et du programme, mais une discussion a suggéré que la quantité limitée de stages et l’impact potentiel de la pénurie actuelle de RHS et des restrictions fiscales sur la qualité peuvent avoir un effet négatif sur certaines organisations. On a noté que les programmes font leur diligence raisonnable afin de répondre à la demande, mais la suggestion de créer de nouveaux modèles de formation est appropriée et recommandée comme solution pour appuyer l’augmentation du nombre d’étudiants suivant ces programmes. Dans l’ensemble, on soutient la simulation comme une partie intégrante des programmes en science de laboratoire médical; pourtant, un manque de définition normalisée et d’application uniforme à l’échelle nationale entrave l’atteinte de cet objectif (voir la définition établie ici) Définition de la simulation. L’analyse environnementale démontre la tendance croissante vers la simulation pour améliorer les programmes d’études, ainsi que le besoin d’arriver à un avis unanime au niveau national sur l’orientation future. Les programmes ont été enthousiastes à l’idée de comprendre davantage sur la simulation et d’obtenir des occasions pour développer un réseau de simulation; cependant, des contraintes budgétaires et l’absence d’échange d’information sont des facteurs limitant l’intégration de la simulation dans les programmes. Des recherches fondées sur les preuves ciblant la profession appuieraient chacun de ces objectifs et permettraient aux analyses de rentabilité de faire progresser les modèles de formation, selon les besoins des étudiants et des programmes dans l’environnement restreint actuel des soins de santé et de la formation.
Sondage sur les expériences des diplômés récents (2016):
Un sondage a été mené auprès des personnes qui ont réussi l’examen de certification de la SCSLM dans les cinq années de la date du sondage (réponses N=483). La satisfaction générale quant à l’état de préparation aux stages cliniques et à la formation sur place a été élevée, répondant aux demandes des étudiants en ce qui concerne leurs compétences techniques et pratiques, et leur capacité à développer leurs aptitudes à l’aide d’équipements de qualité. Les diplômés ont exprimé moins de satisfaction au sujet de la sécurité, et ils ont mentionné des préoccupations relatives à des expériences spécifiques, suggérant un domaine nécessitant un examen plus approfondi. Plus précisément, les données ont reflété l’impact de la pénurie de RHS sur les professionnels de laboratoire médical, ce qui a à son tour affecté l’expérience des étudiants. Les commentaires ont mis l’accent sur l’augmentation de stress et d’épuisement professionnel liée au changement des modèles de dotation en personnel et de volumes de travail, et à la complexité de surveiller les étudiants pendant des périodes restreintes. Ces facteurs ont commencé de remonter à la surface et ils exercent sans doute un effet sur les étudiants; on prévoit que cette situation s’aggravera avec l’évolution du système de la santé.
Forum des formateurs sur la simulation et les stages cliniques de la SCSLM (2016):
Le Forum sur la simulation et les stages cliniques peut être considéré comme un grand succès, ayant atteint les objectifs établis pour la journée. Les participants sont arrivés à une entente uniforme au niveau national relativement à l’impact positif de la simulation sur l’amélioration des programmes d’études, en rehaussant la qualité et en réduisant les heures de stage clinique. Les principales conclusions et recommandations découlant de l’événement sont indiquées ci-dessous:
- On peut maintenant comprendre la simulation comme étant une technique fondée sur des données probantes qui peut réduire les heures cliniques d’une manière positive et significative pour les étudiants.
- Un nouveau modèle visant à améliorer la communication entre les programmes et à encourager le partage des programmes de formation en simulation est nécessaire pour soutenir le changement des programmes à l’avenir.
- Les programmes s’engagent à aller de l’avant en facilitant des changements aux programmes de formation pour permettre aux étudiants d’atteindre les compétences grâce à des stages cliniques et à des expériences de simulation de la plus grande qualité.
- La définition de la simulation spécifique à la profession, telle que déterminée par les participants au Forum, ainsi que les informations contenues dans ce rapport, peuvent contribuer à comprendre la simulation à l’échelle nationale et peuvent être communiquées à l’administration dans le contexte des modèles de rentabilité.
Afin de poursuivre les initiatives de simulation et de stage clinique, il faut favoriser certaines recommandations pour ne pas perdre de l’élan et pour réaliser des changements aux programmes. Ces initiatives comprennent, sans en exclure d’autres :
- Créer une plate-forme de discussion au sujet de la simulation et des stages cliniques pour partager des données probantes et des connaissances (par ex., répertoire d’information, conférence, téléconférence).
- Les employeurs des milieux cliniques devraient participer au débat lors de la prochaine phase du projet, car des changements importants aux programmes dépendent de leur participation.
- Grâce à la collecte d’information supplémentaire d’autres professionnels et aux recherches spécifiques à la profession, on peut déterminer comment intégrer la simulation normalisée dans des programmes.
Simulation Knowledge Exchange – Research Network (SimKERN, 2017) :
SimKERN a été rassemblé par la SCSLM en vue de créer des occasions de réseautage et de transfert de connaissances pour les programmes de laboratoire médical partout au Canada, permettant de produire des recherches en simulation et stages cliniques qui soutiennent la qualité de l’apprentissage et de l’expérience des étudiants, rehaussent la qualité des programmes d’études à l’aide d’information fondée sur des données probantes, et encouragent les employeurs à augmenter le nombre de places pour les étudiants. Il s’agit d’un résultat direct des recommandations faites lors du Forum des formateurs en avril 2016.
Dans l’ensemble, on a établi un objectif pour augmenter la reconnaissance nationale des programmes de science de laboratoire médical en tant qu’innovateurs de programmes axés sur l’étudiant, et pour devenir chefs de file en recherche sur la simulation. Ce groupe a été construit des recommandations des formateurs et parties prenantes au Forum des formateurs en avril 2016.
Le groupe s’est engagé à élaborer des projets d’assurance qualité et de recherche en 2017, à soutenir la série de téléconférences à propos de la discussion nationale sur la simulation et les stages cliniques, et à contribuer à un projet de recherche de grande envergure.
Discussion nationale sur la simulation et les stages cliniques – série de téléconférences (SimTele, 2017) :
SimTele a été créée par la CSMLS et SimKERN, composée de personnes s’intéressant à produire des recherches spécifiques à la profession et des renseignements fondés sur des données probantes au sujet de la simulation et des stages cliniques. Ensemble, le groupe a augmenté la compréhension nationale de la science de laboratoire médical à l’aide de la recherche et des activités d’échange de connaissances dans le cadre de téléconférences mensuelles.
Sondage auprès des employeurs (2017) :
Un sondage en deux parties a été lancé pour obtenir des renseignements des employeurs sur leurs besoins d’environnement clinique associés aux étudiants participant à des stages cliniques, et pour comprendre la simulation comme outil pratique en appui de l’apprentissage des étudiants. Certaines des conclusions principales tirées des résultats ont façonné une application de recherche de grande envergure, notamment :
- des domaines identifiés par les employeurs ne nécessitant pas une formation sur des sujets et des disciplines spécifiques en milieu clinique;
- on a identifié que 21 % des sites cliniques participant au sondage ont indiqué leur capacité à accepter plus d’étudiants;
- des raisons expliquant pourquoi les sites cliniques n’étaient pas en mesure d’accepter plus d’étudiants ont mis l’accent sur l’épuisement professionnel, les fardeaux de travail et un manque de personnel pour superviser les étudiants;
- on a reconnu que 74 % des employeurs ont indiqué que les étudiants étaient suffisamment préparés à des stages cliniques (mentionnant qu’il y a place à amélioration);
- on a noté une déconnexion entre les perceptions des formateurs, des étudiants et des employeurs sur la qualité de divers éléments de formation pendant les stages cliniques (par ex., sécurité, compétences générales/essentielles);
- Accord majoritaire sur l’idée que la simulation est une technique efficace pour former les étudiants en science de laboratoire médical.
Forum des employeurs (2017) :
Dans la lignée des conclusions du Forum des formateurs, la SCSLM a complété la phase 2b du projet, soit le Forum des employeurs (29 avril 2017 à Toronto (ON); co-animé par The Michener Institute of Education at UHN), regroupant des organisations et des représentants de la santé publique et privée qui soutiennent l’apprentissage des étudiants dans des environnements cliniques, en vue de poursuivre la conversation des formateurs. Aux fins de cette discussion et du Forum associé, les « employeurs » sont définis comme des gestionnaires, superviseurs, formateurs cliniques, représentants des organisations et professionnels de laboratoire, qui travaillent directement ou indirectement avec les étudiants. Le Forum a réussi à partager des renseignements selon les perspectives des parties prenantes, à entamer le dialogue et à créer des activités de brassage d’idées pour trouver des solutions aux obstacles au goulot d’étranglement des stages cliniques. Les résultats directement significatifs pour la recherche proposée comprennent l’avis unanime que la création de recherches basées sur la simulation et de programmes d’études fondés sur des données probantes est essentielle pour aller de l’avant, le réseautage continu entre les programmes académiques et les sites cliniques devrait être très important pour la création de toute forme de recherche sur les sites cliniques, et un sens général que les sites cliniques sont préparés à prendre des mesures pour assurer un changement positif. On peut conclure que l’étude proposée est conforme aux attentes discutées au Forum, et la SCSLM continue de répondre à la demande de ses parties prenantes en laboratoire médical.
Prise de position de la SCSLM (2018):
La SCSLM soutient l’utilisation de la simulation dans des milieux universitaires comme une technique pédagogique visant à aider les étudiants à atteindre des compétences conformément aux exigences de la SCSLM. Cette prise de position reconnaît l’utilisation de la simulation pour remplacer en partie et/ou améliorer la formation par stages cliniques comme une solution viable et contributrice à la croissance de la main-d’œuvre en laboratoire médical au Canada.
Appel à l’action (2018):
La SCSLM est en train de diffuser un appel à l’action pour des programmes académiques, des lieux de stages cliniques, des laboratoires et la profession pour aborder la pénurie nationale des RHS, notamment les technologistes de laboratoire médical au Canada.
Pour en savoir plus, veuillez lire l’appel à l’action (à venir en automne 2018) ou contacter research@csmls.org.